Leçon d'honneur du Professeur Alexandre Buttler

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Event details

Date 27.11.2019
Hour 17:1519:00
Speaker Prof. D. Andrew Barry, Doyen ENAC a.i.
Prof. Konrad Steffen, Directeur du WSL
Prof. Luca Ortelli, Professeur ordinaire d'architecture
Prof. Alexandre Buttler
Location
Category Inaugural lectures - Honorary Lecture

Parcours scientifique d’un écologue: entre recherche fondamentale et appliquée

Inscription requise: https://forms.gle/fdcPqs4XoiYhsM7p7  

Résumé:

Les termes d’écologie et d’écosystème sont employés dans bien des discours et déclarations, à en oublier parfois qu’à l’origine, il s’agit d’une science qui a pour objectif d’étudier les organismes vivants dans leur environnement et les interactions entre eux. D’ailleurs, le terme d’écologie, créé par le biologiste allemand Haeckel en 1866, signifie « la science – logos – de la maison – oikos ». Les approches sont multiples et font appel à différentes échelles de temps et d’espace et intègrent des disciplines liées à la biologie, la chimie, la physiologie, la physique, la modélisation mathématique, la géologie et à la géographie.

La leçon d’honneur a pour objectif de montrer quelques exemples de recherches scientifiques qui ont ponctué ma carrière, en prenant quatre objets d’études que sont les tourbières, les pâturages boisés des montagnes jurassiennes, les cultures sur brûlis à Madagascar et les plantations de palmier à huile en Colombie.
Même si les tourbières de Suisse sont presque anecdotiques en termes de surface sur le territoire, au niveau de l’hémisphère nord elles occupent de vastes territoires. Une de leurs propriétés est de capturer le carbone dans la tourbe qui, si elle venait à le relâcher dans l’atmosphère par sa décomposition, contribuerait aux gaz à effets de serre. Le réchauffement climatique et l’assèchement des sols tourbeux mettent en péril l’équilibre fragile de ces milieux. A cet égard, les tourbières de Suisse peuvent servir de révélateur précoce des changements puisqu’elles se situent en marge méridionale de leur répartition dans l’hémisphère nord. Nos études descriptives et expérimentales ont mis en évidence certains mécanismes de la régénération de la tourbe sur les surfaces anciennement exploitées ainsi que, à l’inverse, des mécanismes bio-géochimiques de relâchage du carbone avec les changements globaux.
Les pâturages boisés sont des milieux emblématiques de nos montagnes jurassiennes. Ils subissent également les effets des changements globaux. Des expériences de transplantations de monolithes de sols avec leur végétation herbacée ainsi que de jeunes arbres acclimatés aux milieux froids de la montagne ont été entreprises. Ces sols avec leurs plantes ont été placés dans des conditions plus chaudes et sèches à plus basse altitude pour simuler le réchauffement climatique. Nous avons mis en évidence la nature des changements, tant au niveau de la biodiversité des plantes, qu’à celui de la morpho-anatomie des jeunes arbres ou celui des sols. L’arbre est un élément important dans le paysage pour atténuer les effets du réchauffement climatique, notamment en protégeant le sol. La diminution de la couverture neigeuse représente un autre facteur qui affecte les sols. A l‘échelle paysagère, ces changements peuvent affecter la production de fourrage. Nous montrons également l’intérêt de mettre en commun des compétences dans diverses disciplines scientifiques pour modéliser les systèmes écologiques et faire des scénarios de développement à l’échelle du paysage.
La grande île de Madagascar est bien connue pour sa richesse biologique exceptionnelle, mais hélas aussi pour les nombreuses déforestations et la surexploitation des bois précieux. L’une des causes de la disparition des forêts est la culture sur brûlis, une pratique ancestrale consistant à utiliser la forêt primaire comme réserve de sol pour les cultures, avec comme unique engrais les cendres du bois brûlé. L’inconvénient majeur de cette pratique est qu’elle n’est pas durable et les sols s’épuisent rapidement, ce qui fait que les agriculteurs se tournent vers de nouvelles surfaces de forêts intactes. Dans nos études expérimentales, nous avons cherché à optimiser cette pratique, notamment en utilisant mieux les ressources des forêts secondaires qui couvrent d’importantes surfaces et dont la valeur est moindre, et en améliorant la durabilité des sols. L’utilisation de compost fait localement avec les bois de cette forêt secondaire et mélangé aux cendres, permet d’augmenter les rendements du maïs. Ainsi, les sols peuvent être cultivés plus longtemps, ce qui a pour conséquence de limiter les nouveaux défrichements.
L’huile de palme est généralement décriée en raison des déforestations massives qui ont été pratiquées pour les plantations de palmiers dans les principaux pays producteurs que sont l’Indonésie et la Malaisie, avec pour conséquences un relâchement important de carbone dans l’atmosphère et des atteintes à la biodiversité. Nous avons étudié des alternatives à ces pratiques, notamment en Colombie où les palmiers sont plantés sur des pâturages abandonnés et dégradés, sans déforestation. Nous avons pu montrer que dans ces conditions, le bilan de carbone du système incluant le sol et la biomasse peut être neutre.


Biographie:

Alexandre Buttler est né à Zürich, mais a passé toute sa scolarité à Genève, puis à Neuchâtel. Il a fait ensuite des études de biologie à l’Université de Neuchâtel, complétées par un stage en agronomie à l’ETHZ. Après un post-doc au Queen Mary College de l’Université de Londres et un autre au Ottawa Research and Development Center, il revient à l’Université de Neuchâtel en tant que chef de travaux. Il est ensuite nommé professeur ordinaire à l’Université de Franche-Comté, puis professeur titulaire à l’EPFL où il a dirigé le laboratoire des Systèmes écologiques ECOS, issu d’une joint-venture avec l’Institut fédéral de recherches WSL. Durant cette période, il a été le Directeur du Site WSL à Lausanne. Il est aussi professeur invité à l’Université Adam-Mickiewicz, à Poznan, Pologne.

A. Buttler se définit comme un scientifique de la recherche appliquée, qui aime travailler sur le terrain, à étudier des questions concrètes qui peuvent apporter des solutions à la gestion des milieux. Il a conduit de nombreux projets de recherches dans les marais et systèmes sylvo-pastoraux de Suisse, mais ses activités scientifiques et projets se sont étendus à d'autres pays, principalement à la France, Pologne, Roumanie, Sibérie, Madagascar, Colombie, Cameroun, Canada et aux États-Unis.
Durant sa carrière, A. Buttler a encadré de nombreux étudiants durant leurs travaux de master et supervisé vingt-six doctorants, avec toujours la même passion et le souci de permettre aux jeunes chercheurs de prendre de l’indépendance. Proche de la nature, A. Buttler s’est beaucoup investi dans la formation des étudiants aux questions environnementales, avec une perspective résolument transdisciplinaire pour élever les questions scientifiques au niveau sociétal.
 

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